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Lutte contre les mannequins trop maigres: “Ces textes ne servent à rien”

Postato il 05.05.2017 da write@toscani.com Commenti Commenti disabilitati su Lutte contre les mannequins trop maigres: “Ces textes ne servent à rien”

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source: lexpress.it

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Elles devront fournir un certificat médical et la mention “photographie retouchée” sera obligatoire. Oliviero Toscani, photographe, ne croit pas à l’efficacité de ces mesures.

Ses photos laissent rarement indifférent. Oliviero Toscani a été le monsieur scandale de Benetton. La marque doit à ce photographe italien de 75 ans certaines de ses campagnes chocs. Depuis plus de dix ans, il s’illustre également dans une lutte contre les troubles alimentaires dans la mode. En 2007, il photographiera la Française Isabelle Caro pour la publicité “No Anorexia”. La jeune mannequin décédera trois ans plus tard de cette maladie.

 A partir du 1er octobre, les photographies retouchées pour modifier la silhouette des mannequins devront le mentionner et dès samedi, les jeunes femmes devront fournir un certificat médical pour exercer leur activité, selon deux textes publiés ce vendredi au Journal officiel. Ces textes sont d’abord destinés à “prévenir les troubles du comportement alimentaire”, notamment chez les jeunes. Mais pour Oliviero Toscani, ils “n’empêcheront jamais les mannequins d’avoir des troubles alimentaires”.

Selon vous, fournir un certificat médical pour exercer peut-il constituer une mesure efficace pour éviter les mannequins trop maigres?

Franchement non. Qui va contrôler ces certificats? Je me bats contre l’anorexie dans le milieu de la mode depuis 15 ans. Je refuse par exemple de photographier des mannequins trop maigres, car objectivement je ne trouve ça pas beau. Mais chaque personne a le droit de faire ce qu’elle veut avec son corps. On ne peut pas interdire à une fille de travailler uniquement parce qu’elle est trop maigre quand même. Et puis, nous ne sommes pas à l’abri de certificats médicaux de complaisance.

Que pensez-vous de l’obligation d’accompagner les photographies de la mention “photographie retouchée” lorsque l’apparence corporelle des mannequins a été modifiée?

C’est le même principe que les cigarettes. Ce n’est pas parce qu’il y a écrit sur les paquets “fumer tue”, que les gens s’arrêtent de fumer. Indiquer que la photographie a été retouchée ne changera rien. Il y a 50 ans, les journaux montraient des filles pulpeuses et heureuses. Aujourd’hui, elles sont maigres et tristes. C’est ça le problème. Je ne retouche jamais une mannequin sur mes photographies. Car la retouche, c’est se repentir, c’est chercher le consensus pour plaire au maximum de gens. Donc c’est médiocre.

Ces textes ne servent donc à rien?

Oui, ces textes ne servent à rien, ils n’empêcheront jamais les mannequins d’avoir des troubles alimentaires. En Italie, une loi imposant de présenter un certificat médical a également été adoptée, mais cela ne marche pas chez les gens immoraux qui profitent de ces filles.

Pourquoi la mode aime les mannequins maigres?

C’est très simple: les vêtements sont plus beaux sur des corps maigres, donc ils se vendent mieux. Les photographes, les couturiers, les rédactrices des journaux s’en fichent des filles, ils veulent uniquement vendre leurs produits. Ils n’aiment pas les femmes, mais la mode. Tout ça c’est du marketing. Pour moi, imposer un certificat médical sert uniquement à alléger la conscience des professionnels. Ce ne sont pas les mannequins qui devraient présenter un certificat médical, mais plutôt ceux qui produisent les images, certains couturiers, coiffeurs, photographes, maquilleurs, rédacteurs à qui l’on devrait demander un certificat psychologique.

Alors que faudrait-il faire?

Il faut faire évoluer notre perception sociale de la beauté et il est indispensable que la mode se rende compte qu’elle a une responsabilité éthique. Pour changer les mentalités, cela passe donc d’abord par l’éducation. Car il faut se rendre compte que les journaux fabriquent ce que leurs lecteurs achètent. Pour lutter efficacement contre l’anorexie, il ne faut pas viser les défilés, fait pour le petit milieu de la mode, mais plutôt les journaux, la télévision, les réseaux sociaux qui touchent, eux, des millions de personnes.